“Ils étaient bien conscients que ça venait des produits”

Pascal Fourneau est issu d’une famille de commerçants berrichons. Il est arrivé en Bourgogne à l’âge de 16 ans et après un an au lycée viticole de Beaune, il a commencé à travailler dans les vignes.

C’est là qu’il a rencontré Isabelle au moment des vendanges, il s’est même cassé deux côtes en la voyant !

Salarié dans le vignoble du Mercurey en Saône et Loire pendant 30 ans, il effectuait tous les travaux de la vigne : « Je préparais les bouillies pour les traitements, sans protection, en short et t-shirt. Je mélangeais la cuve de 1500 litres avec un balai. J’emportais la cuve dans la vigne pour faire le plein de l’enjambeur, j’allais rebrancher les tuyaux. L’enjambeur allait traiter et je travaillais en même temps dans la vigne, j’étais arrosé de produits ».

Pascal est tombé malade en 2008 : « Ça m’a pris d’un seul coup, dans les jambes, impossible de marcher. Quatre mois après, ça a recommencé dans les pieds, les jambes, les bras, la poitrine, les côtes, la colonne. Des sensations de paralysie, de brûlures, de démangeaisons, les mollets durs comme du bois ». Commence alors trois années d’incertitudes et de solitude, balloté entre son médecin, la médecine du travail, les hôpitaux de Lyon et Saint Étienne, sans qu’un diagnostic précis sur ses troubles ne soit posé. Alternent les périodes où il peut travailler et les arrêts maladies. « La MSA m’appelait pour m’arrêter en période de traitement des vignes, ça veut dire qu’ils étaient bien conscients que ça venait des produits. » Son médecin traitant également fait le lien, heureusement, et Isabelle tient le coup et le soutient.

En 2011, c’est par des recherches généalogiques qu’ils entendent parler de Denis Camuset et le contactent. Le lien avec Phyto-Victimes est fait. Ophélie Robineau dépose le dossier de Pascal auprès de Maître Lafforgue, et Pascal et Isabelle participent à l’Assemblée Générale à Bourges en 2013. C’est l’occasion pour eux de rencontrer d’autres malades : « Laurent Guillou de chez Triskalia avait les mêmes symptômes que moi. Il m’a conseillé d’aller à Paris rencontrer le Professeur Belpomme ». Il a fallu plus d’un an avant que Pascal ne se décide à y aller. Le Professeur Belpomme pense à deux causes possibles pour ses symptômes : soit les pesticides, soit les ondes. Pascal passe un encéphalo-scan et réalise que son cerveau n’était plus oxygéné correctement : « J’avais une perte de 70 % ! D’où mes gênes pour respirer, parler, mes problèmes de vue ». Dès le second rendez-vous, Pascal a enfin un diagnostic : hypersensibilité chimique multiple (MCS) : « Je savais enfin ce que j’avais, ce contre quoi je devais me battre ».

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Le quotidien est très compliqué : les produits parfumés (gels douche, shampoing, lessives), les encres, les plastiques, les tissus synthétiques, la fumée, les plastiques, les peintures, et bien sûr les pesticides sont sources de nausées, fatigue chronique, vertiges et migraines.

Il débute un traitement qui lui apporte enfin des améliorations au niveau de sa santé. Cependant, comme la maladie n’est pas reconnue en France, le coût – plus de 4 000 € par an – est à leur charge alors que Pascal subit un licenciement en 2014. Après deux ans de chômage, il ne trouve que des contrats courts dans des domaines où il n’est pas exposé. Isabelle, qui travaillait à temps partiel, doit trouver un temps plein. Les conséquences sont lourdes pour toute la famille, pour Anthony et Elodie leurs enfants : « des amis nous ont tourné le dos, car « on ne fréquente pas quelqu’un de malade » ».

Aujourd’hui, la procédure au Tribunal depuis 2011 est toujours en cours d’instruction, celle auprès du Tribunal des Affaires Sociales court aussi depuis 2015, pour être enfin reconnu en maladie professionnelle. Pascal espérait pouvoir se passer des médicaments, mais ce n’est pas le cas.

Pascal est rentré au Conseil d’Administration de Phyto-Victimes en 2016, « pour m’occuper des malades, témoigner ». Le fait d’être filmé dans « insecticide mon amour », de témoigner dans des cinémas, lui a apporté la reconnaissance locale du milieu associatif sensibilisé à l’environnement de Saône et Loire. C’est ce réseau qu’il a pu mobiliser pleinement pour la réussite de l’AG de Phyto-Victimes à Fontaines le mois dernier.

Depuis, son rôle de relais local Bourgogne-Franche Comté est encore mieux identifié sur le territoire, et il a été contacté par plusieurs riverains de vignes malades. Il vient d’intégrer le Bureau de Phyto-Victimes comme secrétaire.

« Ce qui reste difficile, c’est que lorsque je témoigne, comme ma maladie ne se voit pas, alors on ne me croit pas toujours. » C’est cela aussi tout le travail mené à Phyto-Victimes : rendre visible les victimes invisibles des pesticides.

Si comme Pascal et Isabelle vous souhaitez devenir relais local de l’association Phyto-Victimes, contactez Aline Fournet à contact@phyto-victimes.fr ou par téléphone au 06.74.78.88.27

Phyto Victimes

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